Soutenance de thèse de Jérémy LINDEMANN

Ecole Doctorale
Sciences Juridiques et Politiques
Spécialité
Doctorat en droit spécialité Histoire du droit
établissement
Aix-Marseille Université
Mots Clés
Restauration,royaliste,Parlementarisme,Charte,Ultra-royalisme,
Keywords
ultra-royalism,Restoration,royalist,Charte,Parlementarism,
Titre de thèse
L'ultra-royalisme sous la Restauration (1815-1830) : entre traditionalisme monarchique et parlementarisme
The ultra-royalism under the Restoration : a heterogenous political movement
Date
Samedi 26 Mars 2022 à 10:00
Adresse
3 Avenue Robert Schuman, 13628, Aix-en-Provence
Salle des actes
Jury
Rapporteur Mme Karen FIORENTINO Université de Bourgogne
Rapporteur M. Laurent REVERSO Université de Toulon
Président M. Patrick CHARLOT Université de Bourgogne
Directeur de these M. Eric GASPARINI Université d'Aix-Marseille
CoDirecteur de these M. Michel GANZIN Université d'Aix-Marseille

Résumé de la thèse

À l’inverse de leurs adversaires libéraux, les ultra-royalistes ont laissé à la postérité l'image d'hommes rétrogrades, profondément rancuniers, hostiles à toute innovation, prônant un retour intégral à l'Ancien-Régime. Toutefois, cette image est loin de refléter la réalité du mouvement ultra-royaliste. L'hostilité des ultras à la Révolution ne fait aucun doute, pour des raisons aussi politiques que personnelles la Révolution était leur Némésis. La nature contre-révolutionnaire de l'ultracisme est donc sans ambiguïté, elle avait renversé la monarchie, mais également bouleversé leurs existences, en forçant certains à l'exil ou à la clandestinité. Pour anéantir la Révolution et ses idéaux, les ultras avaient beaucoup réfléchi sur ses causes et ses conséquences. Leur adhésion aux thèses providentialistes ne les avait pas empêchés de pointer du doigt les faiblesses structurelles de l’Ancien-Régime et de remettre en cause l’absolutisme. Terminer la Révolution ne voulait pas dire nier son existence et revenir à la France de 1788. Les ultras avaient conscience qu’un tel projet était une chimère. Leur ambition était de restaurer la monarchie et de faire renouer le pays avec son passé monarchique, tout en prenant en compte les bouleversements sociaux et politiques qui avaient eu lieu. Pour ce faire, ils cherchèrent à surmonter les divisions de la société française en tentant de la rassembler autour de la figure christique de Louis XVI, le roi martyr. Néanmoins, ils n’oublièrent pas de réclamer des récompenses pour les partisans de la cause royale, et des mesures répressives pour ses adversaires révolutionnaires et bonapartistes. Mais le grand apport des ultras eut lieu en matière institutionnelle. Ce furent eux qui permirent l’implantation du régime parlementaire en France, en mettant en pratique l’ébauche de ses grands principes. Ce furent les ultras, qui conférèrent un véritable pouvoir législatif aux Chambres de la Restauration en osant proposer et adopter des amendements désapprouvés par le roi. Ce furent encore eux qui tentèrent de soumettre les ministres au contrôle des Chambres par diverses techniques comme le pétitionnement ou l’adresse. Pour justifier l’octroi aux Chambres de tels pouvoirs, ils arguèrent qu’elles représentaient la nation, aux travers de ses opinions dans un premier temps, puis de ses intérêts dans un second. Les relations tendues entre le pouvoir exécutif et la majorité de la Chambre introuvable firent réfléchir les ultras aux moyens de prévenir les conflits entre le roi, ses ministres et les Chambres. En s’appuyant sur l’exemple de l’Angleterre, ils estimèrent qu’un conflit entre l’exécutif et les Chambres devenait impossible si le ministère bénéficiait d’une majorité de soutiens dans chacune des deux Chambres, et surtout la Chambre basse. Dès lors, la sagesse voulait que le roi nomme ses ministres parmi les membres de la majorité de la Chambre des députés, ou parmi des personnes ayant la confiance de cette majorité. À l’inverse, lorsque le ministère ne disposait plus de majorité dans les Chambres, le devait soit dissoudre la Chambre des députés soit changer de ministère. En énonçant ces axiomes, les ultras établissaient la responsabilité politique des ministres devant les Chambres, qui est le principe essentiel du régime parlementaire. Les ultras ne se contentèrent pas de théoriser la responsabilité des ministres devant les Chambres, ils la mirent en pratique. En effet, c’est en mettant en minorité le dernier ministère Richelieu lors du vote sur l’adresse de 1821 et en menaçant de le faire sur le projet de prorogation de la censure qu’ils firent chuter ce ministère et parvinrent au pouvoir. Les ultras posèrent ainsi, en France, les fondations du régime parlementaire.

Thesis resume

Unlike their liberal opponents, the ultra-royalists left to posterity an image of retrograde men, deeply resentful, hostile to all innovation, advocating a complete return to the Old Regime. However, this image is far from reflecting the reality of the ultra-royalist movement. The hostility to the Revolution is not in doubt, for political as well as personal reasons, the Revolution was their nemesis. The ultra-royalist movement's counter-revolutionary nature is unembiguous, it had overthrown the monarchy and disrupted their lives, forcing some into exile or clandestinity. In order to annihilate the Revolution and its ideals, the ultras had given much thought to its causes and consequences. Their adherence to providentialist theses had not prevented them from pointing out the structural weaknesses of the Ancien-Régime and questioning absolutism. Ending the Revolution did not mean denying its existence and returning to the France of 1788. The ultras were aware that such a project was a chimera. Their ambition was to restore the monarchy and reconnect the country with its monarchical past, while taking into account the social and political upheavals that had taken place. In order to do this, they sought to overcome the divisions in French society by trying to rally it around the Christ-like figure of Louis XVI, the martyred king. Nevertheless, they did not forget to demand rewards for the royal cause's supporters, and repressive measures for its revolutionary and Bonapartist opponents. But the great contribution of the ultras was institutional matters. It was they who made it possible for the parliamentary regime to be established in France, putting into practice the outline of its main principles. It was the ultras who conferred real legislative power on the Restoration Chambers, daring to propose and adopt amendments disapproved by the king. It was the ultras who tried to subject ministers to the control of the Chambers by various techniques such as petitions and adress. To justify granting the Chambers such powers, they argued that they represented the nation, first through its opinions and then through its interests. The tense relations between the executive and the majority of the untraceable Chamber made the ultras think how to prevent conflicts between the king, his ministers and the Chambers. Based on the example of England, they considered that a conflict between the executive and the Chambers became impossible if the ministry had a majority supporting them in both Chambers, especially the lower one. It was therefore wise for the king to appoint his ministers from the majority of the Chamber of Deputies, or from those who had the confidence of that majority. Conversely, when the ministry no longer had a majority in the Chambers, the King had to either dissolve the Chamber of Deputies or change the ministry. By stating these axioms, the ultras established the political accountability of ministers to the Chambers, which is the essential principle of the parliamentary system. The ultras were not content with theorising the accountability of ministers to the Chambers, they put it into practice. Indeed, it was by outvoting the last Richelieu ministry during the vote on the 1821 address and threatening to do so on the censorship draft extension that brought that ministry down and came to power. The ultras thus laid the foundations of the parliamentary regime in France.